Loi Energie-climat : l’immobilisme sauf pour le nucléaire

Edito de Bruno Daniel, directeur Maîtrise de la Demande en Énergiemars 2024

Le récent gouvernement Attal a vu la disparition du Ministère de la Transition Énergétique, au profit de Bercy qui récupère la tutelle de l’Énergie. Cette annonce inquiète les acteurs des énergies renouvelables qui y voient la manifestation d’un prisme nucléaire au détriment des énergies renouvelables et des économies d’énergie. Le parcours chaotique de la Loi de Programmation Energie-Climat illustre cette orientation.

Une programmation Energie-Climat avortée

Six mois que l’on attendait une Loi de Programmation Energie-Climat (LPEC), dont la date butoir au 1er juillet 2023 devait permettre d’alimenter un débat parlementaire sur les choix énergétiques de la France en amont de la future PPE 2024-2033 (Programmation Pluriannuelle de l’Énergie).

Dévoilé début janvier, le projet de loi sur la souveraineté énergétique (qui remplace la LPEC) conforte la relance du nucléaire déjà annoncée par Emmanuel Macron avec l’instauration d’un seuil minimum de production jusqu’à 2035, avant la construction de nouveaux réacteurs, vantant « une nouvelle épopée industrielle pour notre pays qui renoue avec l’esprit de la France des bâtisseurs ».

Cette approche renverse la perspective de la loi TEPCV (Territoires à Energie Positive pour la Croissance Verte) de 2015. Cette dernière prévoyait au contraire un plafonnement de la part du nucléaire à 50 % de la production nationale, impliquant donc un développement important des EnR.

Si cette stratégie très nucléaire n’est pas une surprise, ce texte devait annoncer des objectifs par filière permettant d’inscrire une trajectoire de décarbonation pour la France. Or le texte ne donne aucun objectif chiffré pour le développement de EnR. Rétropédalage également sur la rénovation énergétique avec la suppression de l’objectif de rénover l’ensemble du parc immobilier au niveau BBC d’ici 2050. Plus largement, la politique énergétique du gouvernement ne doit plus « réduire » les émissions de gaz à effet de serre et la consommation d’énergie, mais « tendre vers une réduction » de celles-ci.

Pourquoi un tel manque d’ambition ?

Le gouvernement a-t-il voulu produire un texte pouvant être voté par la droite et éviter un débat de fond sur la stratégie énergétique de la France ? L’absence d’objectifs pour les filières énergétiques permet aussi d’attendre le résultat de négociations au niveau européen. La France y plaide l’assimilation de la production nucléaire aux énergies décarbonées.

En effet notre pays doit contribuer à l’objectif européen : atteindre 42,5 % d’énergies renouvelables dans la consommation brute finale d’ici 2030. Mais il aimerait s’exonérer de cet effort en faisant valoir sa production électrique nucléaire.

Le 15 février, la Commissaire européenne à l’Energie Kadri Simson a rappelé la France à l’ordre pour son non respect des objectifs communautaires de développement des EnR dans son projet de plan national énergie-climat pour 2030. Seul pays européen dans ce cas, la France a déjà manqué l’objectif intermédiaire de 23 % d’EnR en 2020, et négocie pour éviter la sanction appliquée par la Commission.

Le signal donné aux filières renouvelables et aux autres pays européens est en tout cas déplorable. Les EnR sont pourtant les seules à pouvoir être déployées assez rapidement pour décarboner la production électrique à court terme. Le projet de loi sur la souveraineté énergétique devait acter leur massification. Critiqué de façon unanime dès son annonce, ce projet de loi a été encore repoussé de 6 mois par Roland Lescure – ministre délégué à l’Industrie et à l’Énergie – lors de sa prise de fonction.

Cet attentisme et ces changements de cap sur les énergies renouvelables sont à contre courant de la baisse tendancielle de la production nucléaire et de la part croissante des EnR dans le mix énergétique mondial (voir les graphiques ci-dessous). Ils soulignent également l’importance des démarches citoyennes comme celle de dwatts pour accélérer la transition énergétique.

investissements secteur electrique AIE
investissements secteur électrique AIE

production électricité  mondiale 2022

Ces projets citoyens, menés au plus près de nos territoires et en partenariat avec les collectivités locales, sont aussi un facteur de résilience, comme l’illustrent nos projets dans la vallée de la Drôme.

Dans cette lettre d’information, vous retrouverez donc un point d’étape sur deux des filières de production d’énergies renouvelables de dwatts, un partage de décisions importantes de la Communauté de Communes du Crestois et du Pays de Saillans et quelques autres sujets intéressants.

Bonne lecture de la lettre d’info de mars 2024, c’est ICI.